Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Lors de la session de janvier 2014, une recommandation LR qui demandait au Conseil d’Etat de réviser le décret concernant la décoration artistique de bâtiments officiels a été discutée par notre parlement. Plusieurs pistes étaient mentionnées dans la recommandation. Allant de la réduction du pourcentage alloué à la décoration artistique jusqu’à sa suppression simple, en passant par un plafond, les pistes évoquées, après une vive discussion n’avaient pas convaincu la majorité de notre conseil. Malgré la décision prise, à la veille des vacances d’été 2015, le Conseil d’Etat a décidé de modifier l’arrêté en question en prenant en compte 2 propositions du député LR qui sont l’introduction d’un plafond à 380'000 francs et un abaissement de la proportion du montant des travaux pour l'intervention artistique. En effet, avec le nouvel arrêté, nous sommes passés de l'intervalle 1 à 2% à l'intervalle 0.5 à 1.5%.
Comme déjà évoqué lors d’une interpellation de notre groupe, faire fi des discussions et du vote négatif du Grand Conseil qui a suivi est inacceptable, tant sur le fonds que sur la forme. La manière de faire de l’exécutif a contraint le groupe socialiste à déposer le projet de loi qui vous est soumis aujourd’hui. En refusant le rapport de la commission législative, le Grand Conseil donnera le signal qu’il veut reprendre la compétence dans ce domaine. Il pourra ainsi ancrer le pourcentage attribué de manière pérenne dans la loi.
L’argumentation du Conseil d’Etat qui s’appuie sur l’augmentation des prix des nouvelles constructions dû à l’introduction de normes telle que Minergie, n’est pour le groupe socialiste pas défendable. En effet, opposer la culture à l’environnement n’est pas concevable pour un Conseil d’Etat qui dit mener une politique tenant compte des différents piliers du développement durable. Il est essentiel de rappeler ici que ce n’est pas l’enveloppe globale d’un bâtiment qui est considérée pour calculer la subvention, mais seulement le coût du gros-œuvre diminué des frais. De plus, pourquoi les acteurs artistiques devraient-ils subir les conséquences de ces augmentations ? Leur travail n’est-il pas également soumis à une indexation ? Ce qui est valable pour un domaine n'est-il pas valable pour un autre ? En poursuivant ce raisonnement, nous aurions pu nous attendre à une augmentation dudit pourcent culturel !
Un des arguments qui a conduit à la mise en place du pourcent culturel est que le soutien aux décorations artistiques des bâtiments offre un accès facilité à la culture en sortant des cadres habituels. Cet élément ne peut, à notre sens, être négligé. En effet, ce genre d'investissement profite à l'ensemble de la population !
De plus, à l’heure où notre canton manque cruellement d’investissements, le signal donné par la modification de cet arrêté ne peut qu’être négatif envers les acteurs actifs dans ce domaine. Enfin, ce pourcent a également comme fonction de soutenir les beaux-arts et les arts plastiques et la baisse voulue par le Conseil d’Etat n’est nullement compensée par d’autres montants dédiés au soutien des mêmes disciplines.
Avec la décision du Conseil d'Etat, nous allons nous rapprocher du demi pourcent culturel pour reprendre l’expression de Monsieur Walter Tschopp dans les colonnes de l’Express/Impartial ! En effet, dans grands nombres des projets, c'est le minimum qui a été choisi par l’autorité, en l'occurrence 1%. Ainsi, nous pouvons nous attendre à une application régulière du strict minimum qui correspondrait désormais à 0.5 %. Une chose est sûre, cette mesure n'est pas le résultat d'une consultation élargie. Les milieux concernés, tout comme les représentants des villes, n'ont pas été associés à la réflexion. Dérogeant une nouvelle fois au dialogue qu’il dit vouloir promouvoir, le Conseil d'Etat a décidé seul. Comment interpréter le fait qu'il n'a pas tenu compte des discussions qui s'étaient tenues quelques mois auparavant dans notre hémicycle ? Pour notre groupe, le fonctionnement des institutions est mis à mal. Nous y voyons un certain mépris.
Nous aimerions rendre attentifs le Conseil d'Etat au fait que derrière ces choix, qui peuvent sembler arithmétiques, se cachent des artistes ou acteurs du domaine, pour lesquels il devient toujours plus difficile d'évoluer, ceci d'autant plus avec la crise du franc fort qui sévit également dans ce domaine.
En conclusion, pour une société plurielle dont la culture est le fondement, nous ne pouvons que vous encourager à accepter l'entrée en matière de notre projet de loi en refusant le rapport qui nous est soumis aujourd'hui.