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Allocution Fête nationale - Les Brenets

Monsieur le Conseiller national,

Madame le Maire de Villers-le-Lac,

Monsieur le Président du Conseil communal des Brenets,

Messieurs les Conseillers communaux des Brenets,

Mesdames, Messieurs, membres du Conseil général des Brenets,

Mesdames, Messieurs,

Chères et chers ami-e-s,


C’est pour moi un réel plaisir et surtout un honneur d’être parmi vous en ce 31 juillet, veille de la Fête nationale. Un plaisir d’être présente en ce lieu - la géologue que je suis ne peux que l’apprécier. Des strates calcaires contenant divers fossiles dans lesquelles le Doubs y a façonné son lit. Le Doubs, lieu frontière avec un pays dont nous partageons la langue, évidemment, mais avec lequel nous avons des liens étroits, nos régions jurassiennes en particulier, dû à des savoir-faire communs, comme en atteste l’horloge atomique de Besançon.


Un plaisir donc, et un honneur car la fête nationale est un moment convivial qui permet de prendre un peu de temps pour interroger notre pays. Notre pays parce que nous y sommes nés. Notre pays parce que nous en sommes citoyennes ou citoyens. Ou notre pays tout simplement parce que nous y vivons. La Suisse, un pays avec lequel nous avons toutes et tous un lien fort, qui explique pourquoi nous sommes ici ce soir.


Interroger cette Suisse, c’est aussi questionner ses symboles, qui sont un héritage commun auquel on ne prête pas toujours attention, ils font en quelque sorte partie du paysage. En cette année de grève des femmes, alors que plusieurs centaines de milliers de femmes et hommes ont pris d’assaut les rues des villes de toute la Suisse pour demander davantage d’égalité, évènement dont la solidarité était bel et bien présente, il m’est difficile de ne pas évoquer Helvetia. Figure historique féminine de la nation helvétique. Figure, qui selon les écrits, est souvent accompagnée de produits issus de la terre. Des produits tels que fruits et fromages. Des produits qui représentent la production et la richesse de la Suisse.


Mais des produits qui font le lien à la nature, à notre environnement. Par sa végétation verdoyante, ses reliefs abruptes, ses plans d’eau multiples, la nature qui façonne les paysages de la Suisse a ainsi toujours fait partie de son identité. Témoin de ce lien à notre environnement naturel, notre devise, celle de notre État moderne de 1848, mais pas très éloigné de l’esprit de 1291: Unus pro omnibus, omnes pro uno - un pour tous, tous pour un.


Une devise qui a pris tout son sens après les inondations en 1868 qui ont touché les Alpes et une devise qui a aidé à renforcer le sentiment de solidarité de ce jeune État. Un État qui par son relief, sa géologie, sa densité a toujours dû affronter les caprices de la nature. Et qui a appris la nécessité de la solidarité pour y faire face. Mais une nature qui peut aussi être mise à mal. Aujourd’hui encore plus que jamais. En effet, en ce lieu, nous savons que le dérèglement climatique est bel et bien une réalité.


L’année passée, l’épisode de sécheresse, liée aussi à une géologie karstique bien particulière de l’Arc jurassien, a marqué les esprits. Un épisode hélas parmi beaucoup d’autres qui touchent et toucheront notre pays.


Par ces épisodes, nous devons apprendre à nous habituer et surtout à nous adapter à des évènements météorologiques extrêmes qui se multiplieront, des évènements météorologiques, issus de ce dérèglement climatique.


Car il faut bien le dire même si ça n’est pas très festif, les prévisions même les plus optimistes n’ont rien de réjouissantes. Augmentation de la fréquence des vagues caniculaires tout comme de celle des inondations ou propagation augmentée de maladies sont des exemples, pour n’en citer que quelques uns.


La Suisse, ses habitantes et ses habitants ne seront donc pas épargnés. Que cela soit directement ou indirectement. En effet, notre agriculture devra également faire face - en plus des épisodes de sécheresse - à des changements sur le comportement de la végétation qui aura des conséquences sur notre alimentation.


Dans cette ambiance un peu morose, je repense aux propos d’Amitav Ghosh romancier, essayiste bengali, qui se demande, « et si le changement climatique était une chance ? ».

Posons-nous la question... Et oui, et si c’était une chance ?


De tels propos peuvent un peu surprendre alors que le ton omniprésent est plutôt alarmiste lorsque l’on parle de réchauffement climatique. Un ton alarmiste que je ne remets toutefois pas en cause. Mais je suis d’avis que ce que nous vivons actuellement est aussi une occasion à saisir. Une occasion pour vivre autrement. Pour changer notre rapport à la nature et donc à notre manière d’en user.


Nous avons à nous réinventer, à innover, à trouver de réelles solutions afin de pouvoir vivre autrement. Pour ce faire, nous avons à retrouver le sens de la communauté, du collectif dans un monde individualiste.


Que cela soit les périodes de sécheresse qu'a connu le Doubs, ou encore les inondations, qui par exemple ont marqué le Val-de-Ruz récemment, font partie de ces évènements dont l’impact peut être plus ou moins lourd pour notre société et face auxquels, l’individu seul ne peut pas grand-chose contre les éléments, lorsqu’ils se déchaînent.


Limiter l’augmentation de ces évènements, tout comme les mesures pour y faire face sera l’un des défis pour notre pays ces prochaines années. Un défi qui peut paraître insurmontable à l’heure actuelle tant il y a à faire, tant nous avons attendu, mais je suis convaincue que nous avons les capacités intellectuelles et scientifiques pour y parvenir.


Notre canton notamment peut largement contribuer à repenser notre manière de fonctionner, d’échanger. Il a plusieurs atouts dans ce domaine, comme j’y faisais référence au début de mon intervention, nous sommes un des cantons à la pointe de la recherche scientifique, qui, plutôt que de rechercher le shampoing qui ne pique pas, peut être mise à grande contribution pour la transition écologique par exemple.


Que ça soit l'Institut suisse de spéléologie et de karstologie ou encore le Laboratoire de photovoltaïque et de couches minces de l’EPFL par exemple, notre canton a des pôles de connaissances reconnus à l’échelon national et même international.


En Suisse, une de nos seules matières premières est la matière grise, et notre canton n’en manque pas ! C’est toujours grâce à ses savoir-faire que notre canton a pu se démarquer et faire face aux différentes crises. Mais aussi par un soutien de l’État. Un État qui comme en 1848 a tout son sens. C’est le moment de s’y mettre, sans tarder, mais avec le sentiment que nous sommes face à un défi nouveau, capital mais surmontable, à condition qu’il y ait la volonté politique. Et celle-ci n’est jamais que la matérialisation de la volonté populaire.


A vous donc, Mesdames et Messieurs, à nous toutes et tous, de nous interroger et de nous déterminer quant à ce futur, qui paraît bien incertain. Allons-nous décider de poursuivre sur la voie actuelle, celle du chacun pour soi, qui nous conduit, certes confortablement mais fatalement, vers l'impasse ou allons-nous virer de bord, en tirant tous ensemble à la même corde ?


Unus pro omnibus, omnes pro uno, confiante en notre devise, je vous remercie de votre attention et vous souhaite une belle fête nationale.

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