Lutter contre le réchauffement climatique, dont la réalité n’est, je l’espère, plus à démontrer dans cet hémicycle, soutenir une gestion durable des ressources naturelles mais également sortir de la dépendance à l’énergie nucléaire, voici pour le groupe socialiste des enjeux primordiaux pour les années à venir. Même si certaines et certains considèrent encore ces thématiques comme non prioritaires, il est important de souligner que c’est d’enjeux sociaux et financiers dont nous parlons. En effet, un réchauffement climatique accru, la pénurie qui frapperait certaines ressources naturelles ou un accident nucléaire dans notre région pourraient avoir des conséquences désastreuses sur notre économie, nos activités et bien évidemment sur notre qualité de vie. Autant d’éléments dont la relance ou le rétablissement auront un coût considérable. Notre groupe reste convaincu que c’est aujourd’hui que les investissements doivent être engagés pour ne pas avoir à payer une ardoise bien trop salée, tant aux niveaux social, environnemental, qu’économique.
A notre échelon, l’échelon cantonal, nous avons en cette fin de législature à traiter de deux dossiers pour lesquels le groupe socialiste nourrit de grandes attentes. Nous sommes persuadés qu’il ne faut pas se limiter à agir sur le plan internationale, fédéral ou cantonal mais qu’il est important d’agir à tous niveaux. Nous sommes également convaincus que notre canton a une réelle carte à jouer dans le domaine de l’énergie. Plus encore aujourd’hui dans la situation économique morose qu’il traverse.
Tout d’abord quelques mots sur la conception directrice de l’énergie. Malgré le peu de moyens mis à disposition dans le domaine, nous sommes désormais en possession d’une conception qui, grâce au dévouement de grands nombres d’experts, constitue un excellent point de départ pour entamer de manière concrète une révolution dans le domaine des énergies. Nous regrettons toutefois que le bilan de la conception précédente n’ait pas été plus étayé. La non atteinte des objectifs aurait notamment mérité d’être davantage explicité. Qu’a-t-il manqué ? Les moyens financiers ? Est-ce lié aux habitudes de la population ? Est-ce en raison d’un manque d’innovation ? Aucune explication ne nous a été proposée.
Evoquons maintenant un élément commun à la dernière conception et à celle qui nous est soumise aujourd’hui : la question des carburants. Des carburants pour lesquels les émissions associées ne cessent d’augmenter. Pour notre groupe, cette problématique est préoccupante. Nous estimons qu’elle aurait dû également être détaillée. En réponse à nos préoccupations, le Conseil d’Etat a toujours répondu que le sujet était de compétence fédérale et que notre marge de manœuvre était limitée en la matière. C’est globalement vrai. Mais regardons de plus près l’une des mesures principales de l’arsenal fédéral qui porte sur l’utilisation de carburants fossiles. Une utilisation à laquelle est liée une obligation de compensation des émissions de CO2 associées. Si la mesure est fédérale, la Confédération a néanmoins sondé les cantons sur le sujet dans la consultation de loi sur le CO2 post 2020. Une occasion pour le canton de se faire entendre donc. Quelle surprise de découvrir que le Conseil d’Etat estime que la part de compensation des émissions devrait être fixée à un maximum 20% alors que la Confédération propose, elle, 80%. Comment justifier une telle position alors que le taux actuellement appliqué de 10% ne produit aucun effet ? La question reste ouverte.
Ceci étant dit, la conception directrice nous confirme que nous disposons d’un potentiel de progrès. Même si la société à 2000 Watt paraît encore à certains difficile à atteindre, nous constatons que les objectifs décrits dans la conception sur l’énergie n’en sont pas tant éloignés. Ceci démontre bien que la précédente majorité du Grand Conseil n’était pas très éloignée de la cible lorsque qu’elle s’était battue pour introduire ce principe dans la loi sur l’énergie. Nous regrettons d’ailleurs que les objectifs n’aient pas été introduits dans la loi sur l’énergie. Le Conseil d’Etat s’est engagé à reprendre cette thématique, nous resterons donc attentifs à ce que ça ne soit pas oublié. Le groupe socialiste acceptera le décret proposé.
Enfin, si nous sommes heureux de voir des objectifs présentés, nous rappelons que pour atteindre ces objectifs, certes ambitieux mais surtout nécessaires, il faut des moyens et c’est là où le bât blesse. Pour le Conseil d’Etat, la LAEL permet de couvrir une grande partie des besoins de la conception directrice de l’énergie. Nous avons beau tourner et retourner les chiffres dans tous les sens, nous ne comprenons pas comment le Conseil d’Etat arrive au chiffre de 70% à 75% de couverture de la conception directrice par le biais de la LAEL. Voici un point sur lequel déjà nous n’arrivons pas à nous entendre avec le Conseil d’Etat.
Nous sommes persuadés que la taxe à vocation énergétique est un outil de politique énergétique, mais qu’il existe également d’autres outils à disposition comme la contribution des grands générateurs de trafic par exemple.
Les groupes de gauche n’ont jamais cessé de soumettre de nouvelles propositions, mais en vain dans un hémicycle où l’écoute n’est pas de mise.
L’écoute n’a pas davantage été à l’ordre du jour des discussions au sein de la commission. Même si le Conseil d’Etat a vendu ce projet comme étant le résultat du compromis, pour notre groupe, il y avait sûrement mieux à faire. Le fait que le projet ait déjà traversé des épisodes douloureux ne suffit pas en faire un compromis. Pourquoi, par exemple, avoir braqué les communes qui sont actives dans ce domaine depuis de nombreuses années alors qu’il aurait été sûrement possible de les associer ? Nous avons l’impression, qu’une fois de plus, le Conseil d’Etat a utilisé la formule « informer est égal à imposer ». En effet, il ne suffit pas d’avoir informé pour avoir convaincu. Comment parler de compromis alors qu’aucune des revendications des partis de gauche n’a été prise en compte à la suite de la consultation.
Ce que nous redoutions, et qui a été confirmé dans l’édition d’hier de L’Express et de L’Impartial, c’est bien que le projet est avant tout un projet CNCI-compatible. Nous déplorons la place que prend un tel lobby et de l’écoute dont il peut bénéficier alors que nous doutons qu’il soit représentatif de toute l’économie neuchâteloise. Qui plus est, selon nos sources, tous les membres de la CNCI n’ont pas été consultés. Ce qui renforce notre sentiment que les entreprises neuchâteloises ne voient pas toutes d’un bon œil l’introduction d’inégalités de traitement entre elles. Pour notre groupe, il n’est surtout pas concevable que le tournant énergétique se fasse sur le dos de la population, des citoyens-consommateurs captifs, et que l’économie n’y participe pas davantage. Dans ce sens, nous combattrons l’exonération des entreprises grosses consommatrices. Des entreprises qui pour certaines peuvent déjà être exemptées de la taxe sur le CO2 et pour l’une d’entre elle de la RPC. Ceci alors que la population n’a aucun moyen d’exemption.
Nous combattrons également la distinction entre basse tension et moyenne tension. Selon notre groupe, il n’y a aucune justification pour une telle différenciation, ceci plus particulièrement pour une redevance à vocation énergétique. Un électron qu’il soit dans un système à basse tension ou à moyenne tension reste un électron.
Les travaux de la commission auront en définitive débouché sur un seul changement. C’est le fait que les toutes les communes devront prélever la taxe énergétique. Ceci nous semble en totale cohérence avec le slogan du Conseil d’Etat « Un canton, un espace ». Nous pouvons simplement regretter que cet élément ne figurait pas dans le projet initial.
L’introduction d’inégalités de traitement entre la population et l’économie, la distinction infondée entre la basse et la moyenne tension a pour seul effet de réduire les recettes dans le domaine de l’énergie. Il est désolant d’avoir à rappeler systématiquement qu’investir dans le domaine de l’énergie ne peut qu’être favorable pour notre économie qui peine en ce moment. De plus à chaque franc investi dans le cadre du programme bâtiments se voit ajouter une part de la Confédération. Pour rappel, le programme bâtiment est à la base un projet de relance de la Confédération lors de la crise de 2009.
Nous sommes bien conscients que ce projet permet d’ancrer dans la loi le fait de prélever les redevances à vocation énergétique et celles pour l’utilisation du sol, mais nous regrettons que ce volet ait été mélangé à la discussion d’aujourd’hui. Ce volet aurait pu être finalisé précédemment. De plus, imposer un système qui réduise les moyens au niveau communal ne nous satisfait pas. La loi proposée laisse peu de marge de manœuvre aux communes.
Pour toutes ces raisons, en l’état, le groupe socialiste, ne peut pas accepter le projet de loi issu des travaux de commission.